Doucement les basses...

Doucement les basses...

Lors des grands concerts, les ingénieurs du son se trouvent installés devant une immense table de mixage encombrée de boutons et de potentiomètres : il faut bien cela pour régler nos groupes favoris. Michel Barnier est dans la même situation à l’Assemblée, avec devant lui onze groupes politiques, et à l’intérieur de ceux-ci des sortes de sous-groupes informels à la docilité et à la fidélité fluctuantes. Qu’il touche à un bouton, disons à droite, et tout se dérègle au centre et à gauche, qu’il touche à un bouton à gauche… vous avez compris. Même dans le « socle » gouvernemental, en principe soudé, chacun y va de sa petite note en toute indépendance.

Difficile de baisser le niveau sonore général, et encore moins de chaque instrument. Tous les « musiciens » du palais Bourbon, ou presque, tapent sur la grosse caisse et donnent de grands coups de cymbales. Les instrumentistes délicats qui ont le sens de la mesure peinent à se faire entendre dans cette cacophonie généralisée. Elle se terminera vraisemblablement en symphonie inachevée avec le 49.3, qui paraît inévitable dans ces conditions.

Dans ce concert désaccordé, Marine Le Pen est installée à la batterie. Elle est la métronome qui peut tout dérégler en provoquant une motion de censure au moment choisi par elle. Pas très confortable pour le chef d’orchestre, qui donne la mesure, mais qui dans le cas présent doit veiller à ce que cet édifice fragile ne s’écroule pas.

Ayant réussi à discuter avec Boris Johnson pour le Brexit, on dit Michel Barnier fin négociateur. Cette qualité qui lui est attribuée, sans doute avec raison, est mise à rude épreuve avec ce projet de loi de finances. Il lui demande des dons de funambule pour ne pas tomber du fil tendu et prêt à céder. Il en va pourtant du destin de la France, car l’heure est grave. À voir les attitudes de cour de récréation de certains solistes, on se demande s’ils ne préfèrent pas leur partition personnelle à l’intérêt général de l’orchestre.

Cette façon de faire de la politique à la petite semaine, cette incapacité à mener des réformes pragmatiques, sont les principaux handicaps du pays. Il faudra les dépasser, pour continuer à exister dans un monde toujours plus difficile, concurrentiel et… dangereux.

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