Loto suisse : 1.5 milliar

Loto suisse : 1.5 milliard de perte

Tsss, c’est à vous dégoûter d’être un bon employé. En prenant les rênes de la maison au début 2009, en pleine tourmente financière, le nouveau patron d’UBS avait diagnostiqué que la banque devait prendre davantage de risques. Elle était trop pépère, vous comprenez : une banque suisse à l’ancienne, avec des plafonds à caissons, des coffres-forts en bronze doré et des chefs de service replets comme des notaires balzaciens. D’accord, c’est bon pour l’image de sécurité. Mais pas pour l’impératif de prospérité : dans le monde moderne, une banque ne peut pas se contenter de prêter bêtement l’argent de ses clients à d’autres clients. Le rapport n’est pas mauvais, notez-le bien ; mais bon, c’est de l’épicerie. Pour faire de la grosse galette, il faut accéder à ce que la profession appelle pudiquement la « banque d’affaires », ce que le commun des mortels appelle le tripot : il faut spéculer. Les résultats de la spéculation sont nécessairement meilleurs pour une institution financière que pour le spieler privé : elle dispose d’informations précieuses (sur ce que font les autres, notamment), qui seraient classées informations d’initié chez le pékin ; elle peut aligner de gros moyens qui lui permettent d’influencer la tendance. Bref, les profits probables sont supérieurs à ceux que génère le simple hasard.

Voilà donc que le jeune K.A., trader de longue date chez UBS, a mis tout son zèle au service des intérêts de sa firme. Mais il a été mal inspiré dans ses derniers paris et vient de perdre autour de 1.5 milliard d’euros. Comment est-ce possible ? On savait déjà que le trading professionnel produit nécessairement des opérations déficitaires ; mais après quelques incidents malheureux, dont un ayant frappé une banque française, il était permis de penser que les gros bugs étaient désormais éradiqués. Reste donc le motif invoqué par UBS : « les pertes sont dues aux activités d’un courtier à l’énergie criminelle importante dans le négoce d’actions à Londres ».Voilà, c’est un problème de recrutement : un bon courtier doit être doté d’une énergie criminelle moyenne ; si cette énergie est importante, il y a danger. On ne voudrait pas médire, mais le DRH d’UBS doit être sanctionné. D’abord, installer ses employés sur une plateforme de trading londonienne, c’est le meilleur moyen de les faire contaminer par la truanderie ambiante. Ensuite, K.A. est d’origine ghanéenne (non, ce n’est pas Kofi Annan, le retraité de l’ONU). Or, depuis l’affaire de la Société Générale, tout le monde sait qu’il ne faut pas recruter de courtier étranger. Il a coûté 5 milliards, Kerviel. Et il est Breton.

La recette du jour

Eloge de la modération

Vous avez vendu la supérette qui vous donnait des insomnies et acheté un casino qui vous permet de travailler la nuit. C’est une bonne idée. Mais conservez vos réflexes d’épicier et interdisez les grosses mises : mieux vaut gagner un peu très souvent que perdre beaucoup une seule fois. Et surtout, surtout, n’engagez personne à l’énergie criminelle importante.

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