Les Français et le spleen

Les Français et le spleen

L’arrivée du printemps provoque d’ordinaire un regain d’optimisme parmi les populations. Un réchauffement du moral, en quelque sorte, sans rapport aucun avec le gaz carbonique. Eh bien cette année, c’est râpé. Les sondeurs de tout poil et de tous pays sont formels : les Français s’enfoncent dans la déprime. La dernière mesure du moral des ménages affiche une glaciation de leur bonne humeur, une extension de la banquise de leur désillusion. Les sociologues anglais en ont rajouté une louche avec gourmandise, mais pour eux la situation est normale : les Français ne sont jamais contents. Tout est prétexte à entretenir leur spleen. Ils sont trop baudelairiens. Pour eux, le verre est toujours à moitié vide. Ils ne savent ni ne veulent être heureux. Sous entendu : bien fait pour eux. Voilà maintenant qu’une nouvelle étude vient obscurcir le tableau : même nos jeunes sont atteints par la dépression décliniste. En majorité, ils « aimeraient partir vivre ailleurs  » que dans leur pays. « S’ils le pouvaient », ajoute le sondage, sans préciser ce qui les retient : il est pourtant plus facile de s’exiler à Singapour que d’y transférer nuitamment ses sous. Sont pas très hardis, nos jeunes globe-trotters en chambre.

S’exiler, pourquoi pas. Mais pour aller où, s’il vous plaît ? Pour mériter un passeport russe, il faut être déjà célèbre et doré sur tranche. Et pouvoir supporter l’interminable hiver moscovite en biberonnant de la vodka. Merci beaucoup. Un pays émergent ? C’est tentant, bien sûr. Les jeunes rêvent aujourd’hui de l’Asie et de l’Amérique du Sud. Encore que seuls les garçons projettent de s’installer en Inde. Pour les filles, le pays est beaucoup trop dangereux, à en juger aux innombrables agressions qu’elles subissent. Au point que de jeunes inventeurs viennent de bricoler une nuisette anti-viol, dont Le Soir nous explique le fonctionnement ingénieux : en cas d’attaque libidineuse, le vêtement de protection libère un « violant (sic) choc électrique » chez l’agresseur. Après l’arroseur arrosé, le voleur volé, voici venu le temps du violent violeur violé. Un juste retour des choses d’ici-bas. Du moins selon les moralistes de la presse belge.

La recette du jour

L’exil et le royaume

Vous êtes inquiet pour l’avenir de vos enfants qui aimeraient, s’ils le pouvaient, vous abandonner pour des terres plus prometteuses. Encouragez-les en ce sens. Devenus ingénieurs, les garçons feront fortune au Brésil ou en Inde. Les filles apprendront le mandarin, la broderie et le cha-cha-cha : elles feront de merveilleuses épouses en Chine, qui affiche un déficit dramatique de filles à marier.

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