Géolocalisation et contrôl

Géolocalisation et contrôle de la durée du travail : Une conséquence accessoire à l’obligation d’équiper les poids lourds d’un boîtier Ecotaxe

La géolocalisation s’entend d’un dispositif permettant de prendre connaissance de la position géographique, à un instant
donné ou en continu, des véhicules mis à la disposition de salariés pour l’accomplissement de leur mission. Si l’employeur est
en droit de contrôler l’activité de ses salariés, une utilisation de la géolocalisation pour contrôler leur temps de travail obéit
cependant à des conditions plurielles et restrictives.

Obligation de déclaration préalable à la CNIL

L’employeur qui souhaite mettre en place un dispositif de géolocalisation
doit effectuer une déclaration à la CNIL, laquelle vérifiera que
les principes relatifs à la protection de données à caractère personnel
sont bien respectés. Elle veillera aussi à ce que le système retenu
n’aboutisse pas à placer un salarié sous surveillance constante et permanente
de l’employeur. La méconnaissance de la déclaration à la
CNIL est pénalement sanctionnée (article 226-16 du code pénal). En
outre, elle rend les conséquences du recours à la géolocalisation inopposables
au salarié.

Obligation de consultation des élus du personnel et d’information des salariés

Le comité d’entreprise est obligatoirement informé et consulté, préalablement
à la décision de mise en oeuvre des moyens ou techniques
permettant un contrôle de l’activité des salariés. Une consultation du
CHSCT est également requise du fait de l’impact potentiel de l’introduction
de la géolocalisation sur les conditions de travail. Enfin, les
salariés doivent être individuellement et préalablement informés de
l’introduction d’un dispositif de géolocalisation.

Le contrôle de la durée du travail ne peut être que l’accessoire à une finalité principale légitime (article 2 de la délibération de la CNIL du 16 mars 2006)

La finalité principale peut être, par exemple, l’amélioration du processus
de production par une étude a posteriori des déplacements
ou encore l’analyse des temps nécessaires aux déplacements pour
une meilleure optimisation des visites clients…Notons que l’obligation
de mettre en place sur les poids lourds un boîtier pour « l’Ecotaxe »
constituera indiscutablement une finalité principale légitime puisque
répondant à une obligation légale applicable, en principe, le 1er janvier
prochain.

Le contrôle de la durée du travail n’est licite que si ce contrôle ne peut être fait par un autre moyen et que si le salarié dispose d’une liberté dans l’organisation de son travail

Sur le fondement de l’article L. 1121-1 du code du travail selon lequel
nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles
et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la
nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché, la
Cour de Cassation en déduit que l’utilisation d’un système de géolocalisation
pour assurer le contrôle de la durée du travail :
- n’est licite que lorsque ce contrôle ne peut pas être fait par un autre
moyen ;
- n’est pas justifiée lorsque le salarié dispose d’une liberté dans l’organisation
de son travail.
Ainsi, si le salarié dispose d’une réelle autonomie dans l’organisation
de ses visites ou tournées, le recours à la géolocalisation pour
décompter son temps de travail ne sera pas justifié. Au contraire, si le
salarié doit suivre une feuille de route précise et que l’employeur ne
dispose pas d’un autre moyen pour décompter son temps de travail, le
recours à la géolocalisation sera justifié.
En tout état de cause, les représentants du personnel ne doivent pas
faire l’objet d’une géolocalisation lorsqu’ils agissent dans le cadre de
l’exercice de leur mandat.

Un tel système ne peut par ailleurs pas être utilisé par l’employeur pour d’autres finalités que celles qui ont été déclarées auprès de la CNIL

Dès lors que l’utilisation faite du dispositif ne correspond pas à celle
qui avait été déclarée, cette utilisation illicite constitue selon la jurisprudence
un manquement suffisamment grave justifiant la prise d’acte de
la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur.
En conclusion et comme toujours en matière de contrôle et de surveillance
de l’activité des salariés, il convient de tenter de concilier l’intérêt
légitime de l’entreprise et le droit pour le salarié de voir respecter
certaines de ses libertés fondamentales.

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