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L’éloquence selon Marc Bonnant

Marc Bonnant a accepté d’être le parrain de l’Association des secrétaires de la conférence Nice. Il était accueilli le 5 juillet par le Barrreau de Nice.

En introduction de son intervention, l’avocat suisse a confié avec un léger sourire qu’une improvisation, c’était « long à préparer  ». « C’est faire surgir à la surface ce qu’on a mis parfois des années à penser. C’est restituer soudainement ce que nous portons en nous », a-t-il ajouté, plantant idéalement le décor pour la suite. Il s’est attaché à définir l’éloquence à partir de la définition du Petit Robert. Mais pas exactement celle donnée plus tôt par Bernard Asso : «  l’art de toucher et de persuader par le discours ». «  Selon mon souvenir, la définition du Petit Robert est plus complexe : c’est l’art ou la technique, de persuader ou de convaincre, par le discours », a exposé Me Bonnant, qui a ensuite décortiqué la définition. Au sujet de « l’art ou la technique  », il a notamment mentionné que « si c’est un art, c’est un don, c’est une injustice première. Si c’est une technique, cela signifie que cela peut s’apprendre, qu’elle peut s’acquérir, c’est une vision généreuse  ». Pour le passage sur « convaincre ou persuader  », il a relevé que «  convaincre s’adresse à l’esprit. Et donc l’éloquence c’est l’aptitude à s’adresser à l’intelligence. L’intelligence c’est lire entre les lignes, comprendre ce qui n’est pas explicite ». Enfin, en référence au discours, il a assuré qu’il fallait «  lire, lire, lire encore. La mécanique vivante de l’éloquence, c’est la lecture. Je parle parce que je lis. Aimez les mots, pratiquez-les  ». Marc Bonnant a terminé au donnant un conseil à ses confrères les plus jeunes : « Apprenez à penser et à penser le contraire de ce que vous pensez. Essayez d’être en opposition permanente. Pensez toujours contre vous-même, jusqu’à ce moment extrême, celui du doute. Je pense donc je doute. La conviction est nécessaire mais c’est l’arrêt de la pensée. Doutez, doutez, doutez encore ».

Marc Bonnant, orateur – et provocateur – hors pair

Si on ne présente plus Marc Bonnant, il est possible de rappeler quelques lignes de son CV : brevet d’avocat obtenu en 1971 et première étude ouverte en 1973. A l’âge de 41 ans, il est devenu le plus jeune bâtonnier de l’ordre des avocats de Genève et il a fondé en 1996 le Cabinet Bonnant & Associés. En 2003, il a reçu de Maurice Druon, secrétaire perpétuel de l’Académie française, le prix du Rayonnement français pour sa contribution à la défense et l’illustration de la langue française. Dans une longue interview accordée au média suisse Blick, diffusée en octobre 2023, Marc Bonnant confiait avoir « voulu faire les Lettres. Puis j’ai voulu être diplomate, comme mon père. Mais j’ai fini avocat : si je maîtrise la parole, je ne sais pas écrire, à mon grand dam ». Au sujet de son côté provocateur il répondait : «  Si par provoquer vous entendez faire naître quelque chose – c’est l’une des étymologies du mot – alors j’ai en effet souvent essayé de faire naître une pensée chez autrui. Être provocateur, c’est être maïeuticien ». Il a surtout une parole totalement libre, qui peut parfois être assimilée à de la provocation. Comme lorsqu’il avouait de façon «  impudique », devant les avocats niçois, avoir « beaucoup d’affection et d’admiration » pour Éric Zemmour. Ce qui a pu faire lever quelques sourcils. Ou encore quand il a cité Charles Maurras parmi ses auteurs préférés, en prenant toutefois le soin de préciser : « si j’expurge l’antisémitisme ». Là aussi les mots ont leur importance.

Photo de Une ©S.G

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