Docteur Death et Mister Nitschke
- Par François-Xavier CIAIS --
- le 26 septembre 2024
La capsule de mort assistée autonome "SARCO" du "Dr Death" vient d’être utilisée pour la première fois
Récemment en Suisse, une capsule de suicide assisté, baptisée « Sarco », a été utilisée pour la première fois, suscitant de vives controverses.
Conçue par Philip Nitschke, un médecin australien installé aux Pays-Bas, la capsule fait l’objet de nombreux débats en raison de son utilisation sans assistance médicale extérieure.
Selon les informations du Volkskrant, c’est une Américaine de 64 ans qui a eu recours à la capsule Sarco – dont le nom provient du mot « sarcophage » – pour mettre fin à ses jours.
Cette première utilisation a eu lieu ce lundi après-midi, bien qu’elle soit en contradiction avec la législation suisse. En effet, bien que la Suisse soit relativement permissive sur le sujet de l’euthanasie, le caractère automatisé et autonome de cette capsule pose problème.
Philip Nitschke, souvent surnommé « Dr. Death », est à l’origine de cette invention controversée, qu’il a développée en collaboration avec le designer néerlandais Alexander Bannink.
Selon le journal suisse Blick, la capsule a été mise en service pour la première fois dans un chalet de montagne à Merishausen, dans le canton de Schaffhouse. Nitschke lui-même a confirmé l’événement au quotidien local NZZ.
Un suicide assisté sans aide extérieure
Philip Nitschke, fondateur et directeur d’Exit International, est connu pour ses ouvrages sur l’euthanasie, parmi lesquels on trouve des guides détaillant les démarches pour une fin de vie autonome.
Parmi ses publications figurent des titres tels que Peaceful Pill eHandbook Essentials et Going to Switzerland : how to plan your final exit. Nitschke, médecin de formation, a reçu de nombreuses distinctions en Australie pour son engagement dans la question de la fin de vie.
Né en 1947 dans une région rurale d’Australie, il a d’abord étudié la physique avant de se tourner vers la médecine. Diplômé de l’Université de Sydney, il s’est ensuite impliqué dans le mouvement pour le droit à l’euthanasie. En 1996, il est devenu le premier médecin à pratiquer une injection létale légale sous le cadre de la loi australienne de l’époque. Cependant, la loi a été abrogée en 1997, poussant Nitschke à se consacrer à la recherche et à la défense de l’euthanasie volontaire.
La capsule Sarco : une innovation controversée
La machine « Sarco » a été présentée en juillet par l’association The Last Resort, qui regroupe des défenseurs internationaux des droits de l’homme cherchant à diversifier les méthodes d’aide à la mort en Suisse.
Cette capsule imprimée en 3D, surnommée « la Tesla de l’euthanasie », permettrait à ses utilisateurs de mettre fin à leurs jours sans assistance médicale directe. La capsule peut ensuite servir de cercueil, ce qui soulève également des questions éthiques et pratiques.
Le processus d’utilisation est simple : l’individu s’allonge à l’intérieur de la capsule et appuie sur un bouton. La capsule se remplit alors d’azote liquide, réduisant drastiquement la teneur en oxygène. L’utilisateur perd conscience en quelques minutes, menant à une mort rapide. L’association The Last Resort affirme que la capsule est gratuite pour les utilisateurs agréés, mettant en avant le droit fondamental à une « belle mort ».
Une mort surveillée à distance
La première personne à utiliser la capsule, une Américaine de 64 ans, s’est donnée la mort ce lundi 23 septembre, en présence de Florian Willet, un juriste et directeur de l’association The Last Resort, qui a supervisé la procédure. Philip Nitschke a suivi le processus à distance depuis l’Allemagne, grâce à des capteurs et une caméra installés dans la capsule. Selon Nitschke, tout s’est déroulé comme prévu. Il a rapporté que la personne avait immédiatement appuyé sur le bouton après s’être allongée dans la capsule, déclarant qu’elle « voulait vraiment mourir ».
Des implications légales et des critiques
L’utilisation de la capsule Sarco a suscité de vives réactions en Suisse. Élisabeth Baume-Schneider, cheffe du Département fédéral de l’intérieur, a déclaré que la capsule ne respectait pas les normes de sécurité ni la législation sur les substances chimiques. Des procédures judiciaires ont été lancées, et certains intervenants, dont Florian Willet, ont été placés en détention provisoire. Les autorités suisses ont également saisi la capsule pour enquête, cherchant à déterminer s’il s’agit d’une incitation au suicide.
L’avenir de la capsule Sarco demeure incertain, pris entre le débat éthique sur le droit à mourir dans la dignité et les impératifs légaux encadrant l’euthanasie.